Pépite du patrimoine, la plus vieille église de l’Oise se fissure et fait trembler tout un village

UN Saint-Léger-aux-Bois, l’église est au centre des préoccupations. Véritable joyaux du patrimoine local, le bâtiment religieux est le cœur de ce village de 800 habitants situé dans la forêt de Laigue, entre Compiègne et Noyon, dans l’Oise. Mais surtout, c’est la plus vieille église du département.

La bâtisse Saint Jean-Baptiste, qui date de 1083, peine à résister durablement aux aléas. Même si elle a survécu aux deux guerreset notamment à des bombardements sur sa façade en 14-18, l’église de Saint-Léger-aux-Bois doit aujourd’hui faire face à plusieurs grandes fissures, apparus à l’intérieur même du site depuis plusieurs mois, plus de 950 ans après sa construction. Comme si la façade commençait à se désolidariser et à être entraînée vers l’avant.

Des fissures et chutes de plâtre dans la plus vieille église de l’Oise

Des chutes de morceaux de plâtre ont également été enregistrés à l’intérieur de la nef. C’est pour cette raison que l’église a fait l’objet d’une mise en sécurité pendant plusieurs mois, le temps que la municipalité puisse installer des filets de protection pour protéger le sol, le mobilier et les visiteurs.

« Notre village est monté sur de l’argile, toute la commune en grande majorité est argileuse. Avec les conditions climatiques, toutes les bâtisses travaillent, y comprennent l’église », explique le maire par intérim, Bruno Gérin. « Il ya eu un enterrement il ya 15 jours dedans », poursuit l’élu qui remplace Thierry Drouet, démissionnaire en octobre dernier en pleine polémique.

Une nouvelle étude pour estimer le coût des travaux de rénovation

Une étude a toutefois été lancée pour faire des études de sol, de structure et de portance. Elle durera un an et permettra de connaître le montant précis des travaux à prévoir. Ceux-ci sont appréciés à 1,5 million d’euros.

On va faire toutes les analyses, mettre des capteurs électroniques pour savoir comment les fissures travailler, on va chercher à savoir s’il faudra renforcer les fondations… La charpente et les tuiles ont aussi bougé. Mais toute la structure dure de la charpente est saine, le clocher aussi. C’est un gros avantage.

Classée monument historique en 1913, l’église Saint Jean-Baptiste du XI^e siècle est toujours debout. Mais de moins en moins d’enterrements sont célébrés dans ce joyau de l’art romain, il n’y aussi plus aucun mariage depuis plusieurs années. « Je suis inquiet mais elle ne va pas tomber demain. On a 5 ans devant nous pour savoir ce qu’il faut faire », certifie l’élu.

Un dossier qui traîne, « sur un devoir de sauvegarde »

« Le dossier de l’église stagiaire depuis plus de 30 ans », déplore Tom Maubant, ancien adjoint à Saint-Léger-aux-Bois. « On a travaillé dessus avec M. Gérin mais avec les relations compliquées avec l’ancien maire, cela n’a pas avancé du tout », regrette l’ancien conseiller municipal d’opposition.

« Comme c’est un monument historique, ça dépend des Bâtiments de France, et il ya très peu d’entreprises habilitées à faire les travaux », poursuit l’ancien élu. « L’ancien maire m’avait dit que selon les derniers échos, les travaux devraient se faire sur 10 ans. Ils pourraient être subventionnés jusqu’à 80% ».

C’est un patrimoine exceptionnel, sur un devoir de sauvegarde. Le gros problème c’est qu’aucun conseil municipal à Saint-Léger-aux-Bois n’a jamais vraiment mis les pieds dedans. C’est un sujet de discorde au sein des habitants aussi, beaucoup ont du mal d’accepter l’idée de dépenser de l’argent public pour un bâtiment religieux.

Depuis sa construction au XI^e siècle, l’église Saint Jean-Baptiste a déjà retenu de quelques restaurations d’époquenotamment son côté méridional et son clocher reconstruits en 1602, la charpente du clocher en 1636, puis une nouvelle fois son clocher au XX^e siècle.

Ou encore quelques travaux, comme la restauration des contreforts, la réfection des gouttetières et le traitement de la charpente, menés dans les années 2000 par l’association « Les amis de l’église de Saint-Léger-aux-Bois », créé en 1989 par des habitants. Mais aujourd’hui, l’édifice a besoin de savoir-faire sur le gros œuvre. La municipalité attend une réponse de la DRAC (Direction régionale des affaires culturelles) après avoir effectué une demande de subventions.

Une église historique avec des reliques, mitraillée pendant la guerre

« On se bat fortement pour que notre église soit rénovée », déclare le maire par intérim. Cette église n’est pas une église comme une autre : à l’extérieur, des impacts de balles les tirées pendant la guerre sont encore visibles. Une fois entré, il faut monter un vieil escalier en bois pour pouvoir apercevoir ses reliques précieuses.

Des « graffitis » faits au crayon de bois par les Poilus sont encore intacts. Les soldats y ont laissé des traces dans la pierre : des dates, des noms et des numéros. Mais aussi des portraits.

« C’est une des rares en style romain a être encore préservée », relève Marc-Antoine Brekiesz, président de l’association « Mémoires et Avenir », qui œuvre dans la promotion du patrimoine.

L’église a survécu à la Première guerre mondiale puis à la Seconde. Un dépôt de munitions des Allemands était installé à Saint-Léger-aux-Bois en 39-45. Il avait été attaqué par les Alliés, ça aurait pu dévaster l’église et le village.

En novembre 2023, cette association avait créé un évènement dans la commune pour récolter des fonds et pour « alerter » en vue d’une rénovation. Des cours à pied organisés, dont la participation était payante, avaient permis de récolter plus de 2 400€.

« Il faut préserver cet édifice quoi qu’il arrive », poursuit l’élu compiégnois, originaire de Saint-Léger-aux-Bois. « Avec toute l’histoire qu’il ya derrière, c’est primordial ». Si les travaux de rénovation il devait y avoir, il devrait compter « entre 2 et 4 ans » selon le maire par intérim. « Mais depuis des années, tout le monde se voile la face parce que c’est un dossier difficile à avaler ».

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